Les chantiers tous azimuts font perdre à la ville son attractivité et sa qualité de vie
Tanger, Rabat, Agadir, Marrakech ... s’en sortent mieux
Les projets livrables de suite
Pourquoi les autres villes y arrivent et pas Casablanca? La question reste posée. Les habitants de Casablanca, véritable chantier à ciel ouvert, supportent tant bien que mal depuis plusieurs années un chaos indescriptible et ne voient pas encore le bout du tunnel.
La métamorphose de la métropole s’opère dans la douleur, alors que des villes comme Tanger, Rabat, Agadir, Marrakech … s’en sortent plutôt bien. Voiries, accès de la ville, ouvrages d’art, projets structurants … des chantiers sont menés tous azimuts, visiblement dans un manque flagrant de coordination et de planification, voire de l’improvisation. Les travaux de voiries se font et se défont à plusieurs reprises (il n’y a qu’à voir l’état des chaussées et trottoirs au centre-ville).
En cause, le chevauchement des compétences entre commune, SDL, arrondissements … S’y ajoutent des cahiers des charges flous et le défaut d’entretien. Certains chantiers menés dans le cadre du plan d’action prioritaire (entamé en 2014) commencent déjà à se dégrader par manque d’entretien. Il ne suffit pas de lancer des chantiers à coup de milliards de DH, mais il faut aussi en assurer le suivi et l’entretien après livraison.
La qualité de vie des habitants s’en ressent, mais pas que. Bien évidemment, tous ces retards ont un coût (dont le renchérissement des matières premières, de la main-d’oeuvre…). Entre-temps, la ville perd en termes d’image, de réputation et d’attractivité (des investissements, des touristes …).
Qui va prendre plaisir à visiter un véritable champ de bataille? Ce n’est pas pour rien que Casablanca a perdu pratiquement 80% des arrivées de croisiéristes à fin mars 2019. Et le manque d’infrastructures d’accueil (le terminal de croisière est toujours en cours de construction) n’en est pas le seul responsable.
Si le PDGC promet de changer le visage de la ville, ses élus n’accompagnent pas cette dynamique. Non seulement ils n’ont pas l’expertise requise pour assurer le suivi des chantiers enclenchés. Pis encore, ils n’arrivent même pas à trancher sur des dossiers brûlants (comme le transport public par bus, la propreté, la décharge de Médiouna …). Comment peut-on dans ces conditions parler de «mobilité durable» ou de «smart-city»?
Les élus de la ville, qui n’ont pas forcément l’expertise qu’il faut pour assurer le suivi des chantiers, ne semblent pas réellement conscients des enjeux réels de cette période transitoire, où la ville opère sa mue à tous les niveaux. Les performances des SDL, qui pilotent la majorité des projets, sont mitigées. Certaines s’en tirent bien et communiquent sur leurs réalisations. D’autres restent muettes (probablement pour mieux cacher leurs défaillances).
Au lancement du PDGC, les décideurs de la ville avaient prévenu les Casablancais qu’il fallait prendre son mal en patience pour une période n’excédant pas les 5 ans.
«Des projets sont en train d’être achevés, alors que d’autres seront entamés dans une ville transformée en chantier à ciel ouvert, mais c’est le prix à payer pour la doter d’équipements et d’infrastructures aux standards internationaux», avait déclaré en 2017 Khalid Safir, ex-wali de la ville.
Aujourd’hui, plusieurs chantiers enclenchés par le PDGC (plan de développement du Grand Casablanca) dès 2014 (voire avant) peinent encore à voir le jour. Ils ont coûté près de 34 milliards de DH, financés majoritairement par l’Etat (mais aussi par un prêt de la Banque mondiale).
La ville s’endette donc pour les années à venir, alors que ses recettes peinent à décoller (son budget annuel ne dépasse pas au mieux 3,4 milliards de DH). Mais vu la cadence actuelle des réalisations, il faudra au moins une décennie pour tout finaliser. Voici un tour d’horizon des projets les plus emblématiques, toujours en phase de réalisation, mais dont les dates exactes de livraison ne sont pas encore connues.
■ Grand théâtre: Une décennie, de l’idée à la concrétisation
Tanger, Rabat, Agadir, Marrakech ... s’en sortent mieux
Les projets livrables de suite
Pourquoi les autres villes y arrivent et pas Casablanca? La question reste posée. Les habitants de Casablanca, véritable chantier à ciel ouvert, supportent tant bien que mal depuis plusieurs années un chaos indescriptible et ne voient pas encore le bout du tunnel.
La métamorphose de la métropole s’opère dans la douleur, alors que des villes comme Tanger, Rabat, Agadir, Marrakech … s’en sortent plutôt bien. Voiries, accès de la ville, ouvrages d’art, projets structurants … des chantiers sont menés tous azimuts, visiblement dans un manque flagrant de coordination et de planification, voire de l’improvisation. Les travaux de voiries se font et se défont à plusieurs reprises (il n’y a qu’à voir l’état des chaussées et trottoirs au centre-ville).
En cause, le chevauchement des compétences entre commune, SDL, arrondissements … S’y ajoutent des cahiers des charges flous et le défaut d’entretien. Certains chantiers menés dans le cadre du plan d’action prioritaire (entamé en 2014) commencent déjà à se dégrader par manque d’entretien. Il ne suffit pas de lancer des chantiers à coup de milliards de DH, mais il faut aussi en assurer le suivi et l’entretien après livraison.
La qualité de vie des habitants s’en ressent, mais pas que. Bien évidemment, tous ces retards ont un coût (dont le renchérissement des matières premières, de la main-d’oeuvre…). Entre-temps, la ville perd en termes d’image, de réputation et d’attractivité (des investissements, des touristes …).
Qui va prendre plaisir à visiter un véritable champ de bataille? Ce n’est pas pour rien que Casablanca a perdu pratiquement 80% des arrivées de croisiéristes à fin mars 2019. Et le manque d’infrastructures d’accueil (le terminal de croisière est toujours en cours de construction) n’en est pas le seul responsable.
Si le PDGC promet de changer le visage de la ville, ses élus n’accompagnent pas cette dynamique. Non seulement ils n’ont pas l’expertise requise pour assurer le suivi des chantiers enclenchés. Pis encore, ils n’arrivent même pas à trancher sur des dossiers brûlants (comme le transport public par bus, la propreté, la décharge de Médiouna …). Comment peut-on dans ces conditions parler de «mobilité durable» ou de «smart-city»?
Les élus de la ville, qui n’ont pas forcément l’expertise qu’il faut pour assurer le suivi des chantiers, ne semblent pas réellement conscients des enjeux réels de cette période transitoire, où la ville opère sa mue à tous les niveaux. Les performances des SDL, qui pilotent la majorité des projets, sont mitigées. Certaines s’en tirent bien et communiquent sur leurs réalisations. D’autres restent muettes (probablement pour mieux cacher leurs défaillances).
Au lancement du PDGC, les décideurs de la ville avaient prévenu les Casablancais qu’il fallait prendre son mal en patience pour une période n’excédant pas les 5 ans.
«Des projets sont en train d’être achevés, alors que d’autres seront entamés dans une ville transformée en chantier à ciel ouvert, mais c’est le prix à payer pour la doter d’équipements et d’infrastructures aux standards internationaux», avait déclaré en 2017 Khalid Safir, ex-wali de la ville.
Aujourd’hui, plusieurs chantiers enclenchés par le PDGC (plan de développement du Grand Casablanca) dès 2014 (voire avant) peinent encore à voir le jour. Ils ont coûté près de 34 milliards de DH, financés majoritairement par l’Etat (mais aussi par un prêt de la Banque mondiale).
La ville s’endette donc pour les années à venir, alors que ses recettes peinent à décoller (son budget annuel ne dépasse pas au mieux 3,4 milliards de DH). Mais vu la cadence actuelle des réalisations, il faudra au moins une décennie pour tout finaliser. Voici un tour d’horizon des projets les plus emblématiques, toujours en phase de réalisation, mais dont les dates exactes de livraison ne sont pas encore connues.
■ Grand théâtre: Une décennie, de l’idée à la concrétisation
Ce chantier pharaonique, dont le coût s’élève à plus de 1,4 milliard de DH, a battu les records en termes de retard. L’écart entre l’idée, la conception et la réalisation a pratiquement nécessité une décennie de travaux. En effet, la décision de doter la ville d’un grand théâtre remonte au début de la décennie. D’ailleurs, le marché de l’architecture a été attribué en 2011 et les travaux devaient démarrer en 2012. Mais ce n’est qu’avec le lancement du PDGC que ce projet a pu se concrétiser. Officiellement, les travaux ont démarré en 2014, ils en sont aujourd’hui à un taux d’avancement de 97%. La livraison est prévue en septembre prochain. Situé en plein cœur du quartier historique de la métropole, le Grand Théâtre se veut l’un des plus importants complexes culturels d’Afrique et du monde arabe. Espace multidisciplinaire dédié à tous les arts de la scène (théâtre, danse, musique, comédie musicale...) ce haut lieu de culture pourra accueillir tout au long de l’année, des manifestations et spectacles culturels et artistiques de dimension internationale.
Mais le défi majeur est celui de la programmation et l’animation d’un théâtre d’une telle envergure. A quelques mois de son ouverture, rien ne filtre encore sur son mode de gestion, sa future programmation ou encore les ressources humaines qui veilleront à la pérennité de ce futur monument.
■ Le parc de la Ligue arabe achevé, mais inaccessible
Le projet de réhabilitation du parc Ligue arabe a mis plus de temps que prévu pour se concrétiser. Il aura fallu des années pour passer du stade de projet sur papier, en mal de financements à la réalisation. La dynamique du PDGC a permis non seulement de dégager les fonds nécessaires (100 millions de DH répartis entre la DGCL, la commune et la région), mais aussi de mettre cette réhabilitation dans un contexte global, qui est celui de la mise à niveau du coeur historique de la ville. Grand-théâtre, église sacré-Cœur, place Rachidi, place Mohammed V, La Casablancaise … tous ces sites mitoyens sont aujourd’hui en chantier dont certains proches de la livraison. La mise à niveau du poumon vert de Casablanca a certes pris fin. Mais le résultat final n’est pas encore visible et l’espace vert n’est toujours pas ouvert au grand public. Beaucoup reste à faire aux abords du parc. Après la démolition des cafés et gargotes qui occupaient les lieux et l’abattage de plusieurs rangées d’arbres, Casa-Aménagement a procédé à l’élargissement de l’avenue My Youssef. Les pique-bœufs continuent toutefois de squatter les lieux. Ce qui gâche le plaisir de la promenade. Le risque de recevoir une fiente sur la tête est probable à tout moment. Sans parler des odeurs nauséabondes et les nuisances de ces oiseaux devenus si nombreux, qu’ils règnent aujourd’hui en maîtres des lieux. Il faudra penser à une solution radicale pour éradiquer ou déplacer ces envahisseurs (en associant éventuellement des ornithologues).
Il reste donc à ouvrir le parc sur son environnement immédiat. Plusieurs anciens établissements ont été démolis pour libérer l’accès au parc de tous les côtés. Même les locaux de la Gendarmerie royale et des FAR, mitoyens du parc, seront un jour ou l’autre démolis pour permettre une ouverture complète sur la ville.
L’idée est de récupérer l’ensemble des espaces du parc sur une superficie globale de 30 hectares. Les deux parties du parc seront réunifiées avec la promesse de mettre en œuvre des actions visant la sensibilisation et l’éducation à l’environnement, notamment en faveur des jeunes (parcours pédagogique, jardins éphémères d’initiation aux notions de jardinage et de connaissances des plantes, …); Mise en œuvre de nouvelles technologies pour la rationalisation de l’utilisation des ressources naturelles (eau, énergie…).
■ Zoo Aïn Sebaâ: Toujours en travaux 5 ans plus tard!
Le réaménagement du fameux zoo de Aïn Sebaâ, vieux de 80 ans, en est à un stade assez avancé (plus de 90%). Il s’agit d’un autre projet, démarré officiellement en 2016 (mais dont les premiers marchés sont lancés dès 2014). Alors qu’au départ les délais de livraison étaient fixés à 36 mois, 5 ans plus tard, le parc zoologique «de dernière génération» n’est toujours pas livré. Entre-temps, la 2e ligne de tramway (inexistante au lancement des travaux) est lancée et la trémie livrée. L’environnement immédiat du zoo s’est complètement transformé, en attendant l’inauguration de ce chantier. La nouvelle conception prévoit 3 aires géographiques: l’Afrique, l’Asie et l’Amérique avec une collection animalière de plus de 45 espèces, une ferme pédagogique, des espaces de pique-nique, kiosques, restaurants… Le tout pour un budget global de 250 millions de DH (répartis entre la DGCL, la commune et la région Casa-Settat). Etendu sur une superficie d’environ 10 ha, le projet est composé d’un espace boisé (5 hectares), un zoo (2,5 hectares), un parc de jeux (2,5 hectares). Ce zoo devra enrichir l’offre divertissement et loisirs de la ville, à condition de proposer des offres et des tarifs étudiés et adaptés aux besoins et au budget des familles originaires des quartiers environnants (Aïn Sebaâ, Bernoussi, Sidi Moumen…) et même d’ailleurs.
■ Un millier de places de parking, mais à quel prix?
Les travaux de réaménagements de la place Nevada (plus connue sous le nom Rachidi) sont déjà achevés. Ils auront nécessité une enveloppe de 130 millions de DH. D’une superficie globale de 18.000 m2, cet espace vert compte un skate parc de 4.000 m, des pergolas et un parking souterrain de 724 places. L’objectif est de pallier le manque de places de stationnement en surface suite au réaménagement du Parc de la Ligue arabe et la fermeture des rues Abderrahmane Sahraoui et Pierre Marie Curie. S’y ajoute la demande de stationnement qui sera générée par l’activité du Grand Théâtre de Casablanca en cours de construction. Ce parking renforcera aussi la capacité du parking de la place Mohammed V (173 places). La capacité cumulée des 2 parkings avoisine donc les 900 places. Il faudra toutefois penser à offrir des tarifs adaptés aux besoins des usagers. Lancé depuis plusieurs mois, le parking de la place Mohammed V (devant la wilaya) est pratiquement désert. Les tarifs démarrent à 5 DH, ce qui est jugé trop cher par les automobilistes.
■ La coupole Zevaco: La réhabilitation qui s’éternise
Il s’agit de l’exemple type du cafouillage entre SDL. Confié au départ à Casa-Patrimoine, le projet de réhabilitation de la coupole Zevaco n’a pas été réalisé dans les délais impartis. Le chantier, démarré début 2017, dont le coût global avoisine les 14 millions de DH, est majoritairement financé par l’opérateur koweïtien Al Ajial Holding, qui y contribue à hauteur de 11,5 millions de DH.
Les clôtures entourent le site (communément appelé Kora Ardia) depuis des années, sans réelles avancées sur le terrain. Outre la coupole Zevaco, Casa-Patrimoine devait notamment superviser les opérations de réhabilitation et rénovation du vélodrome, du marché central, la villa Karl Fick et la cathédrale Sacré Cœur, mais aucun de ces chantiers n’a abouti. Le nouveau DG de cette SDL tente aujourd’hui de redonner un second souffle à la SDL. En attendant, le projet de réhabilitation de la coupole est repris en main en 2018 par Casa-Aménagement. Il en est aujourd’hui à un état d’avancement d’à peine 45%!